Bordeaux Supérieur, le Bordeaux côté face
Un vignoble à lui tout seul : quelques 45 millions de bouteilles par plus de 800 producteurs sont produites chaque année sous cette appellation, Bordeaux Supérieur, qui n’a pas le prestige des saint-émilion, margaux ou autre pauillac mais qui a des idées et du dynamisme. Concrètement, les Bordeaux Supérieur font partie de la grande famille des bordeaux génériques (plus de 50% de la production de Bordeaux) dont ils constituent le haut de gamme. L’appellation est réservée à des vins rouges produits pour l’essentiel dans la vaste région de l’Entre-Deux-Mers et qui répondent à des contraintes de production plus sévères que les simples AOC Bordeaux. Se mêlent dans cette catégorie des propriétés de toutes tailles mais que l’on raccourcissait en « petits châteaux », en opposition aux grands noms du Médoc et du Libournais. Depuis les grands châteaux ont fait sauter la banque et les amateurs ont tout intérêt à lorgner du côté de ces petits qui n’ont parfois de petit que le nom.
Dans ce vaste contingent, certains ont réussi à se faire connaître mais pour beaucoup d’autres c’est l’autre face de Bordeaux : pas de régisseur, pas de chai ostentatoire signé par un architecte vedette, ni de tournées des grands ducs dans les capitales mondiales mais de la sueur pour trouver des marchés, convaincre les banquiers, boucler les fins de mois tout en faisant son travail de vignerons. Cette vie un peu sur le fil est le quotidien de la plupart des producteurs bordelais, exposés aux aléas des marchés comme aux excès climatiques, telle la grêle désastreuse de 2013. Pour l’amateur, dénicher la bonne bouteille dans cette catégorie relevait il y a peu de la performance. C’est moins vrai aujourd’hui tant les progrès récents ont été rapides et largement partagés. Plus de maturité des raisins, plus de soins dans la vinification et l’élevage : beaucoup de ces vins atteignent un seuil minimal de qualité et les meilleurs se posent en alternative parfois bluffante à des bordeaux à priori plus huppés, notamment dans les grands millésimes tels 2009 ou 2010, et à prix doux (souvent moins de 10 e).
Les Talents du Bordeaux Supérieur
Que peut-on attendre d’un bon bordeaux supérieur ? Une agréable évocation du « style » bordelais avec du fruit (merlot dominant), une relative souplesse et un minimum de structure pour digérer un élevage (9 mois minimum) qui se fait le plus souvent en barriques. Depuis plusieurs années, le syndicat des Bordeaux et Bordeaux Supérieur organise chaque année un concours (Les Talents du Bordeaux Supérieur) qui met à l’appréciation d’un jury de professionnels expérimentés une présélection d’une trentaine de châteaux d’où ressortent les six lauréats de l’année. Pour y participer régulièrement, c’est conduit dans les règles de l’art, c’est-à-dire à l’aveugle et dans de bonnes conditions de dégustation. Le but : faire parler de ces vins qui ont rarement les honneurs de la critique et prouver le potentiel des meilleurs, y compris à être des vins de garde. L’édition 2014 qui jugeait le millésime 2012 a révélé son lot de belles cuvées même dans ce millésime compliqué pour le cépage merlot.
Le palmarès et nos coups de cœur
Talents du Bordeaux Supérieur 2012, palmarès : 1 – Domaine de Courteillac. 2 – Château Le Grand Verdus La Grande Réserve. 3 – Château Les Gravières de la Brandille Cuvée Prestige. 4 – Château Lauduc Prestige. 5 – Château Pierrail. 6 – Château Sainte Barbe.
Nos coups de cœur :
Château Lauduc Prestige, 2012 : nez discret, sur le fruit et les épices douces. On aime la texture déliée, le croquant du fruit et l’amabilité des tanins. Le tout porté par une fraîcheur impeccable. Du charme et de la classe. 15/20. 8 €
Domaine de Courteillac, 2012 : beau nez plutôt voluptueux marqué par les épices chaudes et le cacao. Une bouche solide, bien structurée, aux tanins fermes et mûrs. Un beau bordeaux encore marqué par l’élevage et qui devrait évoluer avec grâce. 9 €. 15/20
Château Le Grand Verdus, La Grande Réserve, 2012 : Un nez fin entre fruit et fût. Une bouche ronde, mentholée, fraîche, très séduisante par l’intensité de son fruit épicé qui se prolonge fraîchement sur les accents mentholés du nez. Tanins fins. Digeste et élégant. 15 €. 15/20
Château La Commanderie de Queyret, Cuvée Sybèle, 2012 : arômes plutôt exubérants d’épice douce et de torréfaction. Sensations confortables en bouche apportées par un fruité charnu et généreusement boisé. Style moderne mais séducteur. Devrait plaire. 14/20
L’ensemble de ces vins sont disponibles à l’achat sur le site du syndicat : http://www.planete-bordeaux.fr/boutique/
Photo : l’équipe de vendangeurs du Château Lauduc, excellent représentant de l’appellation. Crédit @ château lauduc
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