Châteauneuf-du-Pape, la Nouvelle Vague

Châteauneuf-du-Pape, la Nouvelle Vague

Le vignoble de Châteauneuf-du-Pape figure assurément parmi les plus prestigieux, cependant, il se distingue de ses illustres semblables par une absence totale de hiérarchie, que ce soit en matière de terroir, comme en Bourgogne, ou par le classement des propriétés, comme à Bordeaux. En ce sens, les initiateurs de l’AOC n’ont pas eu la prétention de fixer de telles règles dans les années 1930, tant il est vrai que son histoire échappe à ces repères. Avec un passé moins glorieux et très peu de leaders à l’époque, un classement des domaines n’était pas envisageable. D’autre part, et même si l’on a défini une typologie de ses terroirs, la partition de son aire en quartiers et d’innombrables lieux-dits aux sols parfois hétérogènes ne permet guère d’encadrer l’appellation sous ce critère. C’est pourquoi Châteauneuf-du-Pape se distingue par le seul mérite de ses acteurs, que ce soient des propriétés historiques, des négociants avisés et bien sûr tous les domaines qui ont émergé depuis plus d’un demi-siècle. Et c’est sous l’angle des mutations les plus récentes, s’opérant le plus souvent à l’occasion des changements de générations, que j’ai sondé l’appellation. Dans ce tour d’horizon du renouveau châteauneuvois, j’ai inclus des noms plus connus pour montrer d’autres facettes d’un renouvellement global et fascinant du vignoble. Leur sélection a suivi le fil de l’objectivité, puisque faite sur la base d’une dégustation préalable effectuée à l’aveugle.  

Les ors d’un renouveau

Si l’appellation Châteauneuf-du-Pape n’a pas institué de hiérarchie, il en existe bien une, informelle évidemment, mais tout de même sanctionnée en pratique par le marché. Qu’ils bénéficient d’un statut mythique ou d’une large notoriété, les domaines qui incarnent l’excellence du vignoble partagent souvent une assise historique riche de plusieurs générations vigneronnes. Ainsi les noms de Rayas, La Nerthe, Beaucastel, Clos des Papes, Mont-Redon, Vieux Télégraphe désignent des propriétés ayant beaucoup fait pour la célébrité du vin de Châteauneuf. Œuvrant dans le sillage de cette élite, bien d’autres acteurs méritent une mention au même titre. L’émulation aidant, cet ensemble de producteurs est d’ailleurs celui qui incarne le plus largement la dynamique qualitative de l’appellation, avec des vins n’ayant aujourd’hui rien à envier à ceux qui les dominent sur l’échelle de la reconnaissance. Mon propos ne les concernant pas directement, je me garderais de les énumérer, leur liste étant relativement longue, le cercle qu’ils forment restant de surcroît à l’appréciation de chaque « expert » ou initié en la matière. Là encore, Châteauneuf-du-Pape défie toute velléité de classement ! Je me suis donc attaché à discerner le ferment de cette dernière catégorie parmi les « jeunes » domaines, qu’ils soient de création récente ou qu’ils recèlent des promesses d’une embellie ou la confirment à la faveur d’un changement de génération. Pour faire bonne mesure et souligner la pluralité qui caractérise le renouvellement de l’appellation, j’ai ajouté quelques acteurs confirmés dont la mutation récente profite à son étoile.

Actrices, acteurs et mes « Oscars »

La sélection qui suit est le fruit d’une dégustation faite dans le plus strict anonymat, ce qui l’accrédite d’autant mieux. Organisée officiellement par le syndicat de l’AOC Châteauneuf-du-Pape, cette dernière avait un caractère exhaustif, puisqu’elle a rassemblé les vins d’une cinquantaine de domaines ou de marques ; les « ténors » précités étant absents, hormis Mont-Redon et Vieux Télégraphe, dont on ne peut que louer la participation. M’ayant séduit lors de cette évaluation, les vins des domaines que je présente ici ont été à nouveau dégustés lors de mes visites à leur cave, et ont largement confirmé mes bonnes impressions initiales. Étendue à l’ensemble de leur gamme, cette appréciation m’a permis de choisir la cuvée qui a eu ma préférence. Parfois évident à mon palais, parfois plus cornélien, mon choix s’est en tout cas porté sur un vin qui ne m’a pas laissé indifférent.

Domaine de L’Abbé Dîne

Héritant sa passion d’un père vigneron qui a été très impliqué dans la coopérative, Nathalie Raynaud a repris des vignes familiales et constitué sa propre cave en 2012. S’agissant d’un ensemble à taille humaine, notre vigneronne a le mérite de tout y faire, ou presque. L’exploitation s’étend sur l’aire des Côtes du Rhône et recouvre 4 ha en Châteauneuf-du-Pape, situés très majoritairement au lieu-dit la Bédine. Ce secteur a d’ailleurs donné son nom au domaine sous la forme d’un jeu de mots plutôt cocasse. Au-delà de son intitulé délicieusement équivoque, l’endroit est très bien doté, dans la proximité du légendaire Château Rayas. Il est servi par ses sols de sables et de safres, et planté de très vieilles vignes de grenache, âgées de quelques 120 ans ! Avec de la syrah et du mourvèdre pour seuls condiments, le rouge qu’elles engendrent s’avère d’un grand naturel d’expression, préservé par un mode d’élaboration sans heurts et un élevage strictement en cuves.

Les trois millésimes dégustés m’ont paru très fidèles au caractère de leur année, se prévalant respectivement d’un épanouissement harmonieux (2016), d’une appréciable fraîcheur de constitution (2017), ou traduisant en délice une année particulièrement riche (2018). Leur fruit transpose également leur différence, avec cependant une constante de fraîcheur pour toujours l’affirmer. Une conception sans fard laisse aux tanins le loisir de soupçonner leur potentiel, distinguant tantôt soyeux et astringence de jeunesse (2018), tantôt une trame plus serrée (2017) et tantôt un aspect fondant gagné par le fruit (2016) ; autant d’indices inspirant confiance sur leur avenir.

Le talent de notre vigneronne s’exprime encore dans la bien-nommée « Réserve des Cieux », précieux fruit d’une petite parcelle située sur le secteur réputé de la Janasse. Là, le seul grenache modèle une cuvée produite depuis 2016, mais uniquement les années fastes. Le reflet de ce millésime convainc du bien-fondé d’un style où l’ambition se lit dans un toucher de matière confondant et un goût d’une teneur proprement phénoménale. On pourrait même éprouver des réminiscences bourguignonnes tant sont patents le raffinement et l’acuité du fruit.

Mon vin préféré :

Rouge 2016

Fleuries et épicées, ses senteurs se présentent sous un jour séduisant. Remarquable, le volume en bouche rehausse la sensation de matière, qui s’en trouve élégamment chantournée, tandis qu’une pointe chaleureuse accompagne un fruit très épicé, auquel des fruits rouges apportent une agréable digression. Des tanins soyeux et délectables viennent couronner ce joli tableau. (26 €)

Domaine du Calcernier

C’est à la faveur d’une succession que William de Courten a créé ce domaine dont les vignes sont réparties sur huit secteurs de l’aire d’appellation, comme c’est le cas pour bien d’autres propriétés. De lieux-dits portant le nom l’Arnesque ou la Crau, il extrait des pépites qu’il concrétise dans ses belles cuvées. Travaillant ses vins avec méthode, il sait néanmoins sortir des sentiers battus en mettant bien en valeur des cépages marginaux, comme le picpoul, ou moins usités, comme le mourvèdre ou le cinsault. Son métier de vigneron, il le pratique avec intuition, jaugeant du potentiel de chaque récolte, notamment pour décider de l’éventuelle élaboration de ses fleurons.  

Si le blanc 2019 relève d’une composition assez classique, le 2018 comprend une part substantielle de picpoul, indéniablement à l’origine de sa personnalité, celle d’un vin onctueux s’exprimant dans un climat de fraîcheur, parfumé et séveux à souhait. Sa vocation gastronomique est toute indiquée, tandis que son successeur affiche au même stade des vertus apéritives, à laquelle invite sa nature cristalline et salivante. Le rouge « Domaine » 2017 joue moins la carte du grenache, mais plutôt celle d’une fusion du mourvèdre et de la syrah avec ce dernier. Passé pour un tiers en fûts de tous ordres, il dispense des senteurs sapides et recèle d’un fruit à la fois gourmand et nerveux évoquant la cerise burlat, sur fond de tanins savoureux.

Très original, sinon unique par sa haute teneur en cinsault (40 %), la cuvée joliment appelée « Les Notes d’Aline » ne voit le jour qu’à l’occasion des années fastes pour ce cépage. Inaugurée avec l’année 2015, elle réapparaît en 2017, mais ne sera pas produite en 2018 ni en 2019. Prenant sa source sur les galets de l’Arnesque, elle fait vibrer les sens par son volume et sa plénitude, la fraîcheur canalisant la richesse suivant un équilibre que seuls les terroirs doués de Châteauneuf-du-Pape permettent d’atteindre. D’une conception similaire, « La Fortune du Pot » fait lui la part belle à un mourvèdre planté sur le versant sud de la Crau, l’un des terroirs prestigieux de l’appellation. Proposé actuellement, le 2016 se présente comme une expression concentrée qui inspire la garde. Pour autant, il fait déjà apprécier un profil gracieux ainsi qu’un fruit généreux aux nuances stimulantes.    

Mon vin préféré :

« Les Notes d’Aline » rouge 2017

Le nez abonde d’un fruit pur et velouté sur un registre de fruits rouges où la cerise prend le dessus comme l’expression d’une belle liqueur, tandis que sa gradation profite à des senteurs d’épices douces. Un courant de de fraîcheur emplit littéralement le palais et confère fougue et relief à une matière qui foisonne sur le ton des arômes et que des tanins tapissent de leur grande finesse et d’une succulence prolongeant à satiété le plaisir du fruit. (34 €)

Domaine de la Charbonnière

Michel Maret a eu la main heureuse en concevant la cuvée les Hautes Brusquières, issue du lieu-dit quasi éponyme et qui engendre un Châteauneuf d’une fraîcheur de constitution éblouissante eu égard à une maturité sans concession. Comme en écho à cette heureuse destinée, ses filles Véronique et Caroline, aujourd’hui en charge du domaine, ont révélé un endroit aussi doué… mais sur Vacqueyras ! Ce parallèle pour dire qu’on s’applique ici à honorer la notion de parcellaire et que cela vaut également pour Vacqueyras, où le domaine possède des vignes. Typiques de cette approche, certaines cuvées reflètent les caractères d’un lieu-dit, même si les sols n’y sont pas strictement homogènes, comme celle intitulée « Mourre des Perdrix », qui rassemble des sables, des marnes sableuses et des safres ? Cité en introduction, « Hautes Brusquières », né sur les Brusquières où les fameux galets roulés, archétype des grands terroirs châteauneuvois, recouvrent des terrains d’argile rouge. Cependant, la règle sectorielle ne s’applique pas à toutes les cuvées, puisque celle issue des plus vieilles vignes, parfois centenaires, provient de sols distincts, qui plus est éloignés les uns des autres (La Crau, Coudoulet, Cristia). D’autre part, le style gouverne les choix des parcelles, s’agissant du rouge emblématique du domaine, lequel est le fruit d’unités à forte dominante sableuse, de manière à assouplir sa texture. C’est également dans cet esprit qu’est conçu le blanc, comme une synthèse des vertus de Mourre des Perdrix et des Brusquières.    

Une dégustation comparative des rouges les plus ambitieux du domaine sur deux millésimes consécutifs, 2016 et 2017, m’a permis de discerner à la fois le caractère de chaque année et l’écho qu’en donne chaque cuvée. Ainsi, la nature du millésime transparaît aisément dans les expressions, avec une fraîcheur de constitution caractérisant l’ensemble des 2017, chaque cuvée reflétant par ailleurs son propre caractère. Quant aux 2016, ils témoignent indubitablement d’une grande année par une maturité superlative, comme au paroxysme de ce qu’un vin peut supporter en préservant les bénéfices d’une naissance aussi exceptionnelle.

Mon vin préféré :

« Les Hautes Brusquières » – rouge 2017

S’ouvrant par une sensation d’opulence, encore peu détaillée, il affiche en bouche des qualités éclatantes et qui subjuguent. En effet, son profil sphérique sous-tend une fraîcheur de constitution qui fait jus d’une texture onctueuse et d’une rare profondeur de goût. Sa structure n’est pas en reste, faite de tanins denses et très sapides, elle est à la hauteur d’une expression d’ensemble absolument remarquable. (46 €)

Domaine de la Graveirette

Située sur la commune de Bédarrides, la cave du domaine n’est pas signalée par une quelconque pancarte. Cette discrétion est volontaire confie son vigneron, Julien Mus, témoignant par-là d’une modestie qui contraste avec le niveau de qualité de ses vins. Des vignes cultivées en biodynamie, une formation en Bourgogne et un métier bien assimilé concourent à des expressions où le naturel le dispute à l’élégance, même si les blancs sont justement façonnés à la bourguignonne. Ici, les vignes en Châteauneuf-du-Pape ne représentent qu’un sixième (4 ha) de la superficie du domaine, les autres étant exploitées avec une même assiduité en Côtes du Rhône ou sous le label Vin de France.

Baptisées par référence à leur terroir, les cuvées « Font de Crau » se déclinent en rouge et en blanc, la nature des sols réussissant brillamment aux deux couleurs. Avec une couverture caillouteuse et de galets roulés, leur texture sablo-argileuse fait merveille entre les mains du vigneron en matière d’équilibre et d’expressivité. Toujours dans le giron de la Crau, il « manie » les safres avec une même dextérité et obtient un rouge bien nommé « Puy de Safre » vibrant de fraîcheur et savourant la cerise. Talentueux dans la mise en valeur de parcelles spécifiques, Julien Mus montre avec un grand brio qu’il sait marier des terroirs distincts au profit d’un rouge pétri de l’identité châteauneuvoise au point de pouvoir prétendre au statut d’ambassadeur ! Tel apparaît le 2016 portant simplement la signature du domaine, une interprétation magistrale et sans artifice de la grandeur du millésime.    

Mon vin préféré :

« Puy de Safre » rouge 2016

Assimilable à du laurier, voire de l’olive verte, un trait de fraîcheur parcourt des arômes de fruits rouges, où perce un parfum irrésistible de cerise griotte. Épousant un grand volume, la texture foisonne de fraîcheur et d’un goût pur évoquant de la liqueur de cerise et pénétrant jusqu’au cœur de tannins soyeusement ourlés. (50 €)

Domaine des Maravilhas

Vigneron sur les appellations Laudun et Lirac, Jean-Frédéric Bistagne le devient sur Châteauneuf-du-Pape en 2015, en y faisant l’acquisition d’une petite parcelle de moins d’un demi hectare, plantée exclusivement de syrah. Produit exclusivement de ce cépage, son premier vin en Châteauneuf sera donc hautement atypique et le restera, puisqu’une autre vigne de syrah vient s’ajouter en 2018 à l’implantation initiale. Cependant, la reprise d’une parcelle de grenache en 2019 ouvrira un nouveau chapitre, celui d’une cuvée ancrée à l’identité globale des Châteauneuf-du-Pape. Situées sur trois secteurs bien distincts, les vignes joueront alors leur symphonie à partir du millésime 2019 pour former un assemblage dominé par le grenache. Cette future cuvée « tradition » sera sur un tempo calcaire, étant donné la nature des terroirs qui l’engendrent, correspondant aux lieux-dits Four à Chaux et Combes Masques, tandis les sables de Palestor apparaîtront en contrepoint.    

Rompu à la pratique de la biodynamie au cœur de son domaine gardois, Jean-Frédéric a eu la chance de reprendre des vignes déjà exploitées en culture biologique, tout au moins celles acquises récemment. Avec ce bénéficie initial, elles seront toutes converties à la biodynamie dès le millésime 2020. Si des senteurs d’olive noire et de tapenade permettent de détecter la présence de syrah dans le 2017, rien en bouche ne laisser deviner qu’il s’agit du seul constituant. Ample et franc, goûtant comme des fruits à l’eau-de-vie, il fait encore valoir une structure fine qui resserre gentiment les papilles.

Mon vin préféré :

« Espirito » rouge 2018

Au nez, des senteurs de fruits noirs comme la myrtille disputent l’expression à une senteur d’olive noire et une note florale de violette. Ce complexe aromatique se transpose dans les saveurs en gagnant un accent réglissé qui revigore une bouche puissante, ample, riche d’une substance juteuse, et dont le soyeux des tanins épouse harmonieusement le profil. (32 €)

Château de Nalys

Avant de rentrer dans le rang, ce domaine a connu une embelli dans les années 1950-1970 en révolutionnant la conception des rouges de Châteauneuf-du-Pape au profit de vins plus souples, issues d’une technique de vinification appelée macération carbonique. Il fut d’ailleurs suivi dans ce sens par d’autres acteurs, et si la méthode a depuis été délaissée, elle a eu le mérite d’être le précurseur d’une nouvelle ère.

En juillet 2017, une nouvelle destinée commence suite à son acquisition par la Maison Guigal, un propriétaire-négociant majeur dans la Vallée du Rhône. Le temps d’une transition, elle place à sa tête en 2019 un homme du métier, Ralph Garcin, auparavant aux commandes de Château La Nerthe, propriété éminente de l’appellation. L’année 2020 voit une extension significative de son vignoble, consécutive au rachat d’un domaine vénérable, les Clefs d’Or, lui procurant ainsi de nouvelles potentialités. Avec un parcellaire étendu et distinct de celui d’origine, le domaine est renommé Château de Nalys. Sur un plan viticole, sa reprise s’est accompagnée d’une conversion à l’agriculture biologique, tandis que sa production a donné naissance à deux gammes, chacune dans les deux couleurs. « Saintes-Pierres » désigne les vins d’expression plus précoce, tandis que « Grand Vin » recouvre ce que cet intitulé laisse clairement entendre, en d’autres termes des cuvées d’un esprit contemplatif, enclins à la garde. L’orchestration de cette distinction en appelle à tout un savoir-faire qui jongle avec les terroirs afin de satisfaire au mieux la vocation de chaque gamme et de chaque cuvée. Ces terroirs sont les grès et safres situés dans le périmètre du domaine, les galets roulés du Bois Sénéchal et ceux de la Crau.  

Une dégustation comparative des derniers millésimes m’a permis d’évaluer l’évolution d’un style vers l’excellence qui s’esquisse déjà dans les 2018-2019, plaçant le domaine sur la trajectoire de ses pairs les plus prestigieux. En blanc, la cuvée « Sainte Pierres » 2019 a bénéficié d’une année faste pour le grenache, ce qui la différencie sensiblement et avantageusement des 2017 et 2018, issus de récoltes moins homogènes. Il présente ainsi une belle identité classique grâce à une pleine maturité du cépage. Pour sa part, le 2017 présente un profil frais et tendu atypique dû à la clairette et au bourboulenc, cépages ayant compensé le déficit en grenache, qui a connu la coulure(*) cette année-là. Malgré les forts contrastes de son climat, l’année 2018 a cependant engendré un vin complet, aux arômes charmeurs, alliant expressivité et élégance. Conçu distinctement et privilégiant la roussanne, le « Grand Vin » 2019 surpasse également ses prédécesseurs par son accomplissement et sa suavité. Ce vin d’émotion succède à un 2017 d’allure plantureuse et suit un 2018 bien réussi, ample, étoffé et sapide.   

Les rouges 2019 étant encore en élevage, l’évaluation a inclus les 2016, dont la finition a été assurée par la Maison Guigal. Que ce soit en « Saintes Pierres » ou en « Grand Vin », le millésime 2016 s’est traduit par des expressions opulentes, à la mesure de sa grandeur, un peu dans le genre « ancienne école ». Et si les 2017 se ressentent d’un grenache déficient et ne sont guère significatifs de la mutation du domaine, les 2018 incarnent avec brio son nouveau style. « Saintes Pierres » apparaît ainsi comme exemplaire d’un terroir de safres, avec de l’éclat dans le fruit et une texture harmonieuse que souligne un joli grain tannique. De son côté, le « Grand Vin » 2018 conjugue la haute teneur des plus vieux grenaches et la puissance qu’ils ont gagnées cette année-là sur les terroirs de galets roulés.  

Mon vin préféré :

« Saintes Pierres » rouge 2018

Sa haute maturité n’entame en rien la fraîcheur aromatique qui exalte un registre pur et velouté où dominent des fruits rouges évoquant la cerise bigarreau, et sous l’influence de riches nuances d’épices douces, de garrigue, de vanille. D’une texture délicate, La bouche esquisse déjà sa plénitude, signe d’un équilibre achevé, sur un goût pénétrant et exquis en écho aux arômes, rendu charmeur par un croquant de jeunesse. Ses tanins tissent une fine trame soyeuse, révélatrice d’un raffinement à venir. (environ 30 €, disponible en 2021)

Domaine Paul Autard

Si Jean-Paul Autard est encore bien présent à ses commandes, sa fille Pauline ne met pas moins la main à la pâte dans les œuvres d’un domaine relativement discret, mais qui a l’insigne mérite d’avoir convaincu du potentiel d’élégance des Châteauneuf-du-Pape, de surcroît dans les deux couleurs. Après une formation technique à orientation commerciale, Pauline fait un passage à la bonne école de Château La Nerthe, domaine éminent de l’appellation, puis rejoint son père en 2014.

Dans l’achèvement du style du domaine, il faut voir un terroir propice à des expressions sur la finesse, nées dans des sables et des safres. Il y a bien entendu des savoir-faire précurseurs, à présent éprouvées, parmi lesquels le mode d’élevage joue un rôle majeur. Et si aujourd’hui la tendance est à remettre en cause la barrique dite bordelaise, ici elle a fait des merveilles et continue à en faire. D’ailleurs la fierté du domaine, la cuvée Juline « voit » le bois pendant tout son cycle d’élaboration, puisque vinifié à même la barrique et élevée patiemment en son sein. Cette conception très originale et rarement pratiquée en rouge se rapproche de celle de blancs faits à la bourguignonne, celle qui caractérise d’ailleurs celui du domaine.     

Le Châteauneuf blanc 2018 témoigne d’ailleurs d’une rare maîtrise de la technique, appliquée ici sur le trio grenache blanc, clairette et roussanne à parts égales. Son élaboration se fait dans toute l’étendue du processus, en opérant une fermentation en douceur, tout comme un élevage prolongé en fûts neufs. Le résultat est un vin de plaisir, dont le boisé harmonieux a enjolivé la texture. Prépondérant dans la production, le rouge « Domaine » relève d’une habileté exemplaire par un 2018 où le grenache, bien que dominant, laisse de l’espace à l’expression de la syrah et du mourvèdre. Dans cette couleur, l’élevage jongle avec l’âge des contenants afin de délivrer une cuvée déjà épanouie, complexe et attrayante par sa fraîcheur. Autre interprétation de la couleur par l’entremise d’un duo équitable grenache-syrah, « La Côte Ronde » joue pleinement la carte de fûts neufs, où elle séjourne pendant près d’un an et demi. Moyennant ce protocole, cette cuvée dévoile le potentiel de fraîcheur d’un secteur de galets roulés et de calcaires fossilisés où des grenaches presque centenaires concourent à l’équilibre et l’élégance de texture caractérisant le 2018. Ce mode d’élevage lui procure par ailleurs une appréciable suavité, alliance heureuse de la douceur d’un fruit mûr et de la sucrosité apportée par le chêne neuf. Issu d’une même composition, « Juline » est le produit de ce que l’on appelle une « vinification intégrale », à savoir un procédé d’élaboration où la fermentation et l’élevage se font dans une même barrique. Il s’en suit une meilleure osmose entre le vin et le bois, ce dont atteste un millésime 2018 doué d’un raffinement qui confine à de la délicatesse, avec cependant une densité de matière qui invite à patienter pour s’en délecter.

Mon vin préféré :

« Juline » rouge 2018

Si un boisé « luxueux » domine l’olfaction et enrobe le fruit, il n’entame ni sa fraîcheur ni son essence. Il en est de même au palais où des saveurs gourmandes filtrent élégamment d’entre les sensations de l’élevage. Cet équilibre avantageux se ressent également dans son profil et sa texture, donnant une bouche de belle amplitude, onctueuse, et qui ne manque pas de vitalité. Des tanins magistraux sont garants de son avenir. (50 €) 

Domaine des Pères de l’Église

Laetitia Gradassi a repris ce domaine familial en 2015, soit une vingtaine d’hectares répartis sur les quatre grands types de terroirs caractérisant le vignoble de Châteauneuf-du-Pape. Elle exploite également des vignes sur l’aire du cru Lirac et d’autres en Côtes du Rhône ou hors AOC, en Vin de France. Rompu au versant commercial de la filière, elle a forgé sa formation au sein même du domaine et étoffé son savoir par des stages dans le Nouveau Monde. Et même si elle se dit modestement autodidacte, le brio qui caractérise l’entière production atteste d’un métier très bien acquis.

Le domaine ne met en bouteille qu’une petite moitié de ses vins, une part bénéficiant d’un tri soigné à la vigne puis à la cave. La diversité des contenants mis en œuvre dans le travail au chai témoigne de la maîtrise technique et du discernement dont notre vigneronne fait preuve pour chaque cuvée. Ainsi, son Châteauneuf-du-Pape blanc, baptisé « Le Calice de Saint-Pierre », est pour moitié élaboré en cuve inox, et pour le reste, vinifié et élevé en grands fûts de 500 litres. Et si la production de son équivalent en rouge fait appel à pratiquement tout le matériel vinaire, celle du rouge d’exception, « Héritage de Pollux », utilise une cuve tronconique en bois puis des demi-muids pour son vieillissement.

Nés de l’indéniable doigté de Laetitia, les vins n’oublient pas cependant de plaire ou de captiver, des qualificatifs qui s’appliquent sans hésitation au rouge 2017 « Le Calice de Saint-Pierre ». Composé aux trois-quarts de grenache, il tire ses nuances du mourvèdre et d’une syrah élevée en barriques neuves. De cette alliance bien trouvée naît un complexe fruité attrayant, ainsi qu’une expression littéralement savoureuse, pour ne pas dire réjouissante, mariant sucrosité et salinité minérale. Sur un autre registre, les vertus d’une année comme 2017 se perçoivent de manière éloquente dans le rouge « Héritage de Pollus », issu d’une parcelle de grenaches centenaires sur le lieu-dit Coste Froide, un terroir exposé au nord et d’un mûrissement tardif. La concentration permise par ce millésime confine ici à une densité hors pair caractérisant son entière constitution. Cette cuvée superlative aura bientôt son alter ego en blanc, un vin de pure clairette, non encore baptisé, dont 2019 sera l’année inaugurale. Ainsi, des vignes dépassant le demi-siècle sont à l’origine d’une expression très gourmande, riche d’une jolie sève et parée d’une noble amertume rappelant celle de l’amande fraîche.   

Mon vin préféré :

« Héritage de Pollus » rouge 2017

Sa puissance et sa densité aromatique captivent, tout comme d’ailleurs la richesse d’un fruit où l’on distingue comme des cerises très mûres ou en coulis. En bouche, l’équilibre atteint à la perfection et sublime le toucher de matière ainsi que sa diffusion. Encore sous la coupe de la jeunesse et de l’élevage, son expression s’avère néanmoins séduisante, d’une amplitude de goût infinie et gâtée de surcroît par une parure de tanins soyeux. (38 €)

Clos Saint-Antonin

Si l’étiquette Clos Saint-Antonin ne se rapporte pas à un domaine éponyme, elle désigne toute de même une vigne à part entière sur la commune de Courthézon, là où la famille Sabon produit des Châteauneuf-du-Pape parmi les plus remarquables de l’appellation. Tout autant impliquée dans ces vins-là, ceux signés du Domaine de la Janasse, Isabelle Sabon leur a donné une nouvelle dynamique en créant en 2015 une entité distincte, à savoir une seule parcelle située sur un sol très sableux. L’unité de terroir caractérisant le Clos Saint-Antonin contraste avec la typologie diverse donnant naissance aux vins de la Janasse. Cette unité se double d’une autre, celle du grenache comme unique constituant de la seule cuvée de rouge portant sa signature. Apprécié sur trois millésimes (2016, 2017 et 2018), Clos Saint-Antonin apparaît comme un vin où l’expressivité prime sous la forme d’une fraîcheur de texture constante tout au bénéfice de son équilibre et de son agrément, y compris dans une année chaude, comme 2016. Autre vecteur d’énergie, la dimension tannique s’exerce ouvertement, plaçant dans un courant sapide la sensation de matière, un parti qu’Isabelle assume en arguant à juste titre qu’il s’agit de « vins de plats et non d’apéritif ».

Mon vin préféré :

Rouge 2018

Vibrant et suave, le nez offre une déclinaison d’arômes d’une grande pureté, faits de fruits noirs mâtinés de réglisse, de poivre et d’épices douces. Une bouche ample au corps ondulant avec élégance exprime sa générosité et un brin de chaleur sous la forme d’un « grand » fruit goûtant comme les arômes tout en favorisant un aspect épicé-réglissé particulièrement savoureux. Déjà appréciable, il esquisse cependant son potentiel par une structure bien assimilée à l’ensemble et d’un soyeux admirable. (33 €)

Domaine La Sousto

Amélie et Gaëlle Barrot conduisent en tandem ce domaine familial, dont la renaissance le doit à leur ancêtre, Lucien Barrot, qui, dans les années 30, raviva son activité éclipsée depuis la crise liée au phylloxéra. Son vignoble couvre une douzaine d’hectares, avec un parcellaire très dispersé sur l’aire d’appellation et, de ce fait, représentatif de trois types des terroirs dominants : calcaire, galets roulés et argile. Le premier millésime arborant l’étiquette « La Sousto » voit le jour en 2013. Il rompt avec une antériorité de vins commercialisés en vrac, une activité qui perdure cependant, puisque la part de production mise en bouteilles reste modérée et relativement stable depuis cette année-là.

Vinifiés par Frédéric Maillet, l’époux de Gaëlle, les vins résultent d’une alliance heureuse des différents terroirs, du moins les rouges, car le blanc provient exclusivement d’un sol calcaire. Composé très majoritairement de grenache blanc, allié à de la clairette, il est produit depuis 2017 sur un secteur fortement ensoleillé, où « les raisins grillent au soleil », ainsi que me l’a confié Amélie Barrot. Pour autant, son expression ne se ressent aucunement de ce creuset et, en 2018, affiche une grande élégance et une persistance confondante. Ces qualités remarquables se doublent d’une pureté de fruit qui ne l’est pas moins. En cela, il faut voir une élaboration appropriée et complimenter sa technique, celle d’une fermentation et d’un élevage en cuve ovoïde en béton. Avec un grenache très dominant, l’unique rouge s’inscrit dans la grande tradition châteauneuvoise. Ce maître-cépage se voit ici accompagné de variétés répandues dans le vignoble comme les syrah, cinsault et mourvèdre, et d’autres plus marginales dans son encépagement, ainsi la counoise et le vaccarèse. Son autre singularité est de provenir d’une vendange en grappes entières, une pratique anachronique héritée de l’oncle qui conduisait le domaine auparavant. L’élevage procède d’une même continuité et s’effectue en foudres de chêne. Fait d’harmonie et de raffinement, sans manquer de caractère, le style du rouge se lit parfaitement dans un 2016 en voie d’épanouissement. La plénitude que ce vin inspire se dénoue dans la dynamique d’une texture fraîche et à travers une structure sensible mais dont le soyeux caresse le palais. Encore dans sa période de gestation, le 2017 laisse néanmoins filtrer un même caractère élégant. 

Mon vin préféré :

Blanc 2018

Un parfum élégant et expressif distingue du fruit à chair blanche, de la poire mûre en l’occurrence, ainsi qu’une note légèrement anisée, le tout coiffé d’un nuage minéral. Particulièrement sensible, l’ampleur en bouche offre comme un écrin de fraîcheur à sa nature onctueuse, tandis qu’un fond puissant met en valeur un fruit sapide au penchant tonique. Un grain minéral souligne la belle tenue d’un ensemble cristallin et raffiné. (32 €)     

Domaine des 3 Cellier

Singulier à plus d’un titre, ce domaine l’est déjà par son nom, qui est bien le patronyme de la famille qui l’exploite. Cellier est ainsi le nom qui réunit Julien et Ludovic, fils de Marceau, qui a géré la propriété jusqu’en 2007. Le troisième Cellier est Nathalie, l’épouse de Ludovic. En charge des vinifications, déjà lorsque son père officiait, Ludovic fait figure de vigneron essayiste, œuvrant sans le schéma directeur qui prévaut dans la plupart des domaines. Proposer une gamme de trois blancs est l’une de ses singularités, surtout quand l’un d’eux privilégie largement la clairette rose, tout comme faire une rouge où domine le mourvèdre, et un autre où c’est le cas de la syrah. On pourrait multiplier à l’envie ce qui démarque ses vins de la moyenne châteauneuvoise, aussi limiterai-je mes remarques au blanc « Réserve », particulier car produit de la seule roussanne et commercialisé à l’aube de son épanouissement, en l’occurrence le 2015. Quintessence d’une parcelle de galets roulés, a priori peu favorables à la couleur, il dément ce présupposé par un profil foncièrement sapide, sans la langueur coutumière au cépage. En dégustant le 2011 (épuisé à la vente), on mesure bien mieux son potentiel par la complexité et les saveurs fascinantes que le temps lui procure. Il inspire la gastronomie comme le ferait un bréviaire pour sommelier ! Bien que jeunes, les autres cuvées de blanc dévoilent clairement leurs qualités. « Alchimie » 2019 affiche un grand éclat aromatique et contient la sève que lui confère une clairette rose dominante. Quant à « l’Insolente » 2019, si elle est plutôt sage au nez, elle découvre en bouche une fraîcheur de texture surprenante, inhabituelle s’agissant d’une pure roussanne sur galets roulés.

Pas moins de quatre cuvées distinguent la production de rouges, où, à l’instar des blancs, la nommée « Alchimie » ouvre la gamme. Cette dernière ne rassemble pas moins de sept cépages, avec une nette dominante du grenache. Proposé actuellement, le 2017 présente une belle constitution, cependant, l’émergence des tanins dessert pour l’instant sa pleine appréciation. Cet aspect est plus achevé dans « Marceau » 2018, une cuvée riche en mourvèdre, un cépage réputé structurant mais qui se manifeste ici sous forme de tanins fins. Il confère également de la tension à l’expression, attisant ainsi la fraîcheur qui imprègne sa texture et que suggère des arômes mentholés. Les vertus d’une syrah prépondérante doublées d’une vinification habile façonnent « Privilège », une cuvée dont la version 2016 respire l’harmonie, ainsi que la suavité suscitée par une puissance feutrée. La classe des tanins situent encore sa grandeur. Fruit d’une année moins faste, le 2015 n’en est pas moins d’un rendu superlatif et atteste d’une haute interprétation de terroirs heureusement complémentaires. » »L’Eternelle » incarne une interprétation élevée du grenache, unique dans sa composition et produit de très vieilles vignes plantées sur des sables et des safres. Elaboré en se gardant de tout effet ou artifice, le 2016 fleure l’authenticité, sous l’agrément de senteurs de garrigue et la sensation d’une bouche puissante sans être massive.  

Mon vin préféré :

« Privilège » rouge 2016

Très velouté, pour ne pas dire crémeux, le nez dispense un fruit très mûr qui reste précis pour autant et rappelle de la cerise mariée à une épice douce comme la vanille. D’une rondeur parfaite, comme sphérique, la bouche irradie sa matière en puissance et la diffuse suivant un équilibre confondant, faisant apprécier sa grâce et délecter sa pulpe. Celle-ci s’insinue au cœur de tanins fins et noblement astringents, faisant saliver leur perception. (44 €)   

Domaine de Ferrand

Vigneron accompli, Philippe Bravey, mérite amplement de figurer dans ce tableau grâce à une démarche répondant aux attentes actuelles en matière d’environnement, ainsi qu’à un style de vin à l’unisson de ce que les consommateurs recherchent aujourd’hui. En effet, même si son domaine n’est pas certifié en agriculture biologique, sa conduite emprunte largement à ses méthodes. En outre, dans sa conception des vins, il déclare travailler intuitivement sans analyse de maturité et en se gardant de vendanger trop mûr, afin de leur préserver « énergie et buvabilité ». Dans cette logique, l’usage qu’il fait du soufre est raisonné, tandis que les vinifications s’opèrent en levures indigènes et que les mises en bouteilles s’effectuent sans collage ni filtration. Et toujours pour respecter l’identité du terroir, l’élevage des vins se garde de l’influence du bois et se fait strictement en cuves. Cet ensemble de mesures et de précautions permet de préserver l’essence et le potentiel de fraîcheur de raisins récoltés tout au nord de l’aire d’appellation, le vignoble étant situé à l’orée de la ville d’Orange. Son métier s’étend à une production de Côtes du Rhône, suivant une gamme judicieusement étagée, et se distingue par celle d’un rouge sans sulfites ajoutés, en Vin de France.

En Châteauneuf-du-Pape, il n’élabore qu’une seule cuvée de rouge à forte dominante grenache. Elle résulte de l’assemblage de deux lots vinifiés et élevés séparément, l’un issu de ses plus vieilles vignes dont certaines ont été plantées en 1904 ! Son autre particularité est de comporter du blanc, en l’occurrence du bourboulenc. Si le 2016 s’affirme par un caractère voluptueux, sur un registre épicé, il le fait sans compromettre la vitalité du fruit et l’équilibre de la matière, avec une élégance que conforte le velouté de sa structure. Dans le 2017, la puissance est sous-jacente, cependant que la fraîcheur sculpte son profil et infiltre ses saveurs pour révéler leur succulence.

Mon vin préféré :

Rouge 2017

Le nez charme par un aspect séveux embaumant la garrigue, un soupçon de lavande, doublé d’une nature fruitée sur la cerise en liqueur. En bouche, la sensation de volume allège celle d’une matière consistante, et fonde un équilibre à la mesure d’une nature foncièrement généreuse. Encore sensible, sa structure fait cependant valoir des tanins bien enrobés, tandis qu’une très longue rémanence du fruit fait foi de sa haute teneur. (24 €) 



(*) La coulure est un phénomène qui se produit lors de la floraison, faisant que les fleurs de la vigne ne sont pas pleinement fécondées du fait de l’écoulement du pollen. Ainsi la fructification ne s’opère pas et entraîne un déficit de récolte.


En les personnes de Michel Blanc, son animateur, et de Marie-Clémentine Savey, je remercie vivement le Syndicat des Vignerons de Châteauneuf-du-Pape d’avoir permis la réalisation de cet article en organisant la dégustation qui lui a servi de référence.  

L’auteur de l’article : Diplômé en histoire de l’art, Mohamed Boudellal est journaliste et consultant en vins. Il a écrit pour la presse spécialisée, principalement pour la Revue du Vin de France et d’autres titres comme L’Amateur de Bordeaux, Gault & Millau et Terre de Vins. Co-auteur dans l’édition 2016 du « Grand Larousse du Vin ».

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