Qui croire dans cette affaire de vin et santé ?
La manière dont une bonne partie de la classe dirigeante de la France semble traiter le vin est une constante source d’étonnement pour un observateur d’origine étrangère comme moi.
Je vis depuis 35 ans en France et je m’estime totalement intégré dans ce pays, mais j’arrive aussi à conserver un peu du regard du « découvreur de mœurs », tel que Montesquieu l’adoptait dans ses Lettres Persanes.
Les dernières annonces faites par le Ministère de la Santé et par d’autres antennes clairement guidées par le puissant lobby hygiéniste (lobby qui semble avoir le vent en poupe, grace à nos impôts) ne sont que les derniers avatars d’une longue série que je ne vais pas résumer ici, mais elles font un peu froid dans le dos ! Et on attend, en vain jusqu’à présent, une riposte des ministres de l’Agriculture ou du Commerce Extérieur. Dans un pays dont le déficit commercial est bien mieux comblé par les exports de vins et spiritueux que par tout autre produit sauf l’Airbus (et ce dernier bénéficie à deux autres pays), je suis étonné par le nombre de balles que les gouvernants tirent dans les pieds des vignerons, grands ou petits. Entre les défenseurs d’une consommation raisonnable et modérée (en existe-t-il d’autres de nos jours ?), et ceux qui considèrent l’alcool, sous toutes ses formes, comme aussi dangereux que l’héroïne, nous assistons depuis des années à une sorte de bataille de statistiques, où les études sur les liens complexes entre consommation d’alcool et santé sont utilisées, dans les deux sens, commes des obus. Cela me rappelle la remarque d’un célèbre Premier Ministre britannique de la fin du XIX ème siècle qui disait : « il y a trois formes de mensonges : les mensonges, les foutus mensonges, et les statistiques. La troisième catégorie est la pire. » Trop souvent on fait dire ce qu’on veut à des études lorsqu’on veut absolument prouver quelque chose. Le vrai problème est que, dans ces annonces censées frapper l’esprit de la population, on pratique allègrement non seulement une interprétation des chiffres qui ne déclare pas son parti-pris, mais aussi l’amalgame et l’approximation. Si vous voulez lire des analyses de qualité de ces annonces alarmistes, je vous refère aux excellents blogs de Jacques Berthomeau ou d’Hervé Lalau (Chroniques Vineuses).
Devant tant de généralités, je suis tenté de recourir à de l’anecdote sous forme de statistique personnelle. Mes grands pères ont atteint les âges de 94 et de 87 ans. Mon père a atteint l’age de 85 ans. Les trois buvaient régulièrement du vin et des spiritueux, sans se rouler sous la table. Aucun n’est mort d’un cancer. J’ai 62 ans et je bois régulièrement du vin (très peu de spiritueux, par goût). Je pratique du sport à raison de 4 heures par semaine. Je n’ai eu aucune maladie grave jusqu’à présent et je me sens en pleine forme. Je n’ai donc aucune raison objective de cesser de consommer une boisson qui me donne beaucoup de plaisir, et qui me fait voyager, rencontrer des gens, échanger et apprendre des choses. Les pamphlets du ministère de la santé me laissent totalement froid et plus que sceptique.
Tout ceci constitue à mes yeux un gigantesque paradoxe français. Ce pays du « bon vivre », de la convivialité, de la gastronomie et des bons vins est-il soudainement pris de honte devant tant de bonheur ? Les italiens disent « heureux comme Dieu en vacances en France ». Est-ce que l’avion aurait été dérouté ? Mais il faut aussi se rappeller que la France est aussi championne de la consommation d’anxiolitiques, et très bien placée (peut-être même championne) dans le nombre d’implantations de restaurants de « mal-bouffe ». Combien d’études sur les effets néfastes sur la santé de ces deux phénomènes ? Enfin, à quand un peu de bon sens dans cette manie de faire peur aux gens qui n’en ont pas vraiment besoin ? Revenons à nos statistiques. Il est statistiquement prouvé que 100% des gens qui respirent meurent. Faut-il cesser de respirer ?
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OK David, tout ceci est OK David, tout ceci est consternant. Au point que j’ai envie de devenir révolutionnaire activiste du vin. Oui, j’ai envie d’entrer en résistance, de constituer un stock de vin encore plus important qu’il ne l’est actuellement dans ma propre cave, de déployer des banderoles « Buvez du Vin ! » sur mon balcon. Pour tout te dire, je sui sen train d’imaginer un roman de science fiction. L’action se déroulerait dans un pays où le vin (sans parler du reste comme le gigot de 10 heures ou le lapin à la moutarde) serait banni. Un mouvement de Résistance pour le Rétablissement du Vin dans la Culture Française, mouvement clandestin, bien entendu, serait mis sur pied par mes soins, bien sûr. Tel un Batman ou un Spiderman, je serais le Wineman qui irait jusqu’à secourir celui qui fait pousse un pied de cabernet franc sur sa terrasse. Bien sûr, il me reste à peaufiner la trame, à travailler le suspens, à dramatiser plus encore… Bien sûr, j’exagère.. Mais nous ne sommes pas loin du moment où il va falloir, nous gens civilisés, nous défoncer pour que le vin ait encore droit de cité dans notre bon vieux pays de vignerons. Je propose que pour le prochain Vinexpo nous portions tous un badge du style « Save French Wines ! » et que nous en vendions un certain nombre d’exemplaires au pris symbolique de un euro. Je propose que, quitte à nous faire emprisonner pour incitation à l’ivresse, nous organisions dans nos quartiers des dégustations gratuites et publiques en sortant nos bouteilles de nos caves. Ah si au moins nous avions un président amateur de vins… Nom d’une barrique, nom d’une pipette, nom d’un verre, battons nous ! Il ne nous reste plus que ça.